Fabrication de la petaghjola
et de la tromba

Le temps de Pâques a toujours été le symbole de la renaissance, que ce soit du Christ ou de la nature. Symbole de la fin des temps de rationnement, la nature se veut plus généreuse et la nourriture se fait plus abondante. La sève commence à remonter le long des arbres endormis par le froid de l'hiver, les jeunes pousses voient pointer leurs premiers bourgeons, les feuilles retrouvent une couleur verte annonciatrice des beaux jours. Le ciste se pare de mille couleurs, la fougère reprend possession du maquis, les villages sortent peu à peu de leur léthargie pour les différents offices religieux du temps de Pâques.
C'est un office particulier, celui des ténèbres, qui va nous intéresser et plus particulièrement deux petits objets très utilisés il y a quelques temps encore par les enfants pour cette cérémonie, mais dont l'usage s'est perdu peu à peu : " a petaghjola " et " a tromba ". (Cf . " U fracassu ceremuniale ").

1. A PETAGHJOLA

La fabrication de la petaghjola est très facile et ne demande pas de matériel particulier en dehors d'un couteau bien aiguisé.
Commencez par trouver une jeune pousse de châtaignier, le diamètre est peu important, mais ne prenez pas trop large pour vous initier.


Veillez à ce que la sève coule en abondance, le travail en sera facilité et vous éviterez ainsi de casser l'écorce (photo1). Une fois la jeune pousse coupée, gardez environ une quinzaine de centimètres intacts (faites en sorte que cette partie ne contienne qu'un œil) et enlevez l'écorce autour.


La partie la plus délicate commence maintenant, il va falloir désolidariser l'écorce du bois (photo 2). Pour ce faire, prenez l'extrémité de l'écorce entre le pouce et l'index, et de l'autre main tenez la partie sans écorce du bois.


Faites un mouvement circulaire pour que l'écorce tourne et se décolle petit à petit du bois (photo 3), pratiquez ce geste à plusieurs endroits sur l'écorce pour ne pas la casser.


Une fois qu'elle est complètement décollée, faites la sortir par le coté le plus fin du bois (photo 4). La suite va demander de l'attention et de la minutie.


Elle consiste à couper avec le couteau la partie la plus rugueuse de l'écorce sur un centimètre (photo 5), pour ne laisser que les fibres lisses.


Vous devez soit couper une petite épaisseur pour enlever la partie supérieure de l'écorce, soit gratter délicatement cette même partie pour ne laisser que la partie lisse et blanche (photo 6). Mais faites attention à ne pas la couper, les fibres ne pourraient plus vibrer !


Une fois cette opération réussie, il ne vous reste plus qu'à aplatir la partie grattée, qui va faire office de languette vibrante et à souffler (photo 7). Votre petaghjola est prête à l'emploi. Vous pouvez obtenir différents sons en aplatissant plus ou moins la partie vibrante.

2. A TROMBA

La fabrication de la tromba ne peut se faire qu'après la petaghjola (photo 1).


A tromba est en fait une amplification de la petaghjola, en ajoutant une corne de résonance. Le son produit par la tromba est plus puissant et plus grave.

Prenez une nouvelle pousse de châtaignier, mais plus grosse cette fois-ci. Faites comme pour la petaghjola, prenez une bonne longueur d'écorce intacte, une trentaine de centimètres à peu près. Mais ne désolidarisez pas l'écorce du bois, car comme la pousse est plus grosse, donc plus vieille, il y aura moins de sève et elle risque d'être cassée (photo 2).

Faites un mouvement circulaire avec votre couteau pour que votre écorce soit découpée en genre de tourbillon (photo 3). Une fois ceci fait sur la longueur de votre pousse, passez votre couteau délicatement sous l'écorce pour la décoller du bois et ainsi éviter de l'abîmer.

Essayer de conserver intacte la longueur de l'écorce, plus la corne sera longue, plus le son produit sera fort et grave (photo 4).

Il faut ensuite enrouler cette écorce autour de la petaghjola, partez du milieu pour avoir une meilleure prise, vous pourrez le décaler une fois fini (photo 5).

Enroulez donc l'écorce sur elle-même, en la décalant à chaque tour, pour arriver à former un cône. Le dernier tour ne doit pas être décalé pour pouvoir l'attacher (photo 6). Faites un petit trou avec la pointe de votre couteau de chaque coté pour y faire passer une petite branche de bruyère, elle servira d'attache à votre cône.

Vous pouvez alors décaler la petaghjola pour que la partie sous le cône soit la plus courte possible, le son en sera plus amplifié (photo 7).

Maintenant il ne vous reste plus qu'à souffler dans votre tromba et si le cœur vous en dit, utilisez-la pendant l'Office des Ténèbres pour faire revivre la tradition (photo 8).

Texte : Pierre-Jean Bresciani ; Photos : Corinne Champier.