LA REVOLUTION CORSE (1729-1769)

Une conférence faite à Cervioni le 1er avril 1989

Par DOROTHY CARRINGTON

Tandis que l’on célèbre, partout en France, la Révolution française, peu de personnes songent à la Révolution corse, qui l’a devancée d’une soixantaine d’années (1). Sauf ici, où j’ai l’honneur et le privilège de vous parler de cet épisode très important de l’histoire de l’île.

Il n’est pas dans mon intention de récapituler en détail toutes les péripéties de cette révolution qui a duré quarante années et qui est sans doute familière à vous tous. Mon propos est de signaler les aspects les plus remarquables du mouvement, ceux qui, à mon avis, lui donnent son originalité et méritent d’être retenus et étudiés en profondeur. C’est avec concision donc que je situe le mouvement dans son contexte historique.

La révolution corse fut un mouvement de décolonisation, le premier dans les temps modernes si on excepte celui des Provinces-Unies. Il fut dirigé contre la République de Gênes qui avait régné sur l’île depuis près de quatre siècles. Comme vous le savez, ce furent les Corses eux-mêmes, excédés par l’oppression de leurs propres seigneurs féodaux, qui, en 1358, sollicitèrent la protection de Gênes, qui venait, chez elle, d’établir un gouvernement de caractère populaire. Les Génois achevèrent ce que les Corses avaient commencé : ils écrasèrent les seigneurs, non sans avoir à réprimer de nombreuses révoltes, parfois avec une extrême brutalité. Leur pratique de la destruction de villages, dont témoignent les chroniqueurs et qui a été récemment étudiée par Jean Cancellieri d’après des documents originaux, obligea des milliers de paysans à s’expatrier de l’île (2). A partir du milieu du XVIe siècle, après une brève intervention française (acceptée par la population comme préférable au gouvernement génois), il y eut accalmie. Les Génois, qui jusque-là n’avaient laissé d’empreinte sur l’île que des ouvrages d’architecture militaire (les six villes-forteresses du littoral) firent certains efforts pour mette en valeur la Corse. Ils encouragèrent la production agricole, en particulier celle des céréales : des emprunts étaient consentis à cet effet, l’argent provenant d’une augmentation de la taxe sur le sel. Ces mesures apportèrent quelques avantages à la Corse sans toutefois, qu’elle devienne véritablement prospère. Les Génois agissaient en tout dans leur propre intérêt, leur but essentiel étant d’obtenir un accroissement de céréale à bas prix pour leur consommation dans la métropole (3).

Ces conditions typiquement coloniales amenèrent le résultat auquel on pouvait s’attendre : tandis que la masse du peuple restait misérable, quelques notables, les " principali ", négociants et grands propriétaires terriens, accédèrent à une relative aisance. Certains d’entre eux, des villages de l’intérieur aussi bien que des villes côtières, fréquentèrent les universités italiennes. Ainsi nous assistons à l’évolution de ce que Francis Pomponi qualifie de " bourgeoisie libérale ", pratiquant les professions de juriste, d’ecclésiastique et de médecin, assez cultivée, et maîtrisant la langue toscane (4).

Bien que les notables aient bénéficié d’une certaine manière du régime génois, ils se sentaient lésés. Le contrôle sur le commerce exercé par Gênes freinait leurs possibilités de s’enrichir. De plus, le Génois interdisaient aux Corses l’accès aux fonctions publiques importantes. Je n’ai pas à vous rappeler que le reste de la population souffrait tout autant du gouvernement colonial. A tous les niveaux il y avait brimades et injustices, exacerbées par une corruption éhontée des magistrats. Comme vous le savez, à défaut d’un système de justice qui méritait ce nom, les Corses avaient recours à leur ancien code de justice populaire : la vendetta. Vers la fin du régime génois les meurtres atteignant le chiffre aberrant de plus de neuf cents par an, dans une population qui ne dépassait pas 130,000 (5).

Dans ces conditions déplorables les communes rurales formaient le noyau de la résistance corse, de l’identité nationale. Agglomérés dans les villes côtières, les Génois intervenaient peu dans l’intérieur, sauf pour percevoir l’impôt. Les villages, unités territoriales autarciques, s’organisaient selon un système traditionnel avec des réunions plénières, auxquelles assistait toute la population adulte, y compris, en certains endroits, les femmes. A cette occasion on décidait de l’exploitation des terres communales, encore très importantes, et on faisait l’élection des officiers communaux : les podestats et les " patri del comune ". Au XVIe siècle cette organisation semble avoir été réellement démocratique ; par la suite, et à l’époque qui nous intéresse, les notables en vinrent à la dominer, en s’appropriant des terres communales et des postes d’autorité (6). Les notables étaient donc doublement puissants : par leur position de personnes instruites et aisées, ainsi que par le pouvoir qu’ils exerçaient au sein d’une structure traditionnelle et solidement établie.

Ce fut dans le Bozio que la Révolution corse éclata à la fin de 1729, quand la population, à la suite d’une mauvaise récolte, refusa de payer des impôts. En peu de temps une grande partie de l’île tomba sous le contrôle des insurgés. Le mouvement fut au début une insurrection paysanne, une jacquerie ; cependant les notables, d’abord hésitants, ne tardèrent pas à en prendre la direction. En décembre 1730 trois chefs furent acclamés : deux généraux – un notable, l’autre un soi-disant noble – auxquels fut adjoint un ecclésiastique. Il convient ici d’interrompre notre récit pour examiner le mouvement insurrectionnel par rapport à la structure de la société corse. La Révolution, rappelons-nous, était une révolte anti-coloniale, et non pas une révolte d’une classe contre une autre. Il n’y avait plus dans l’île de noblesse proprement dite : les quelques familles nobles encore en possession de leurs domaines, mais déchues de tout privilège, ne se distinguaient des notables que par quelques prétentions périmées. Comme la Révolution française, la Révolution corse était menée par des notables, et ces derniers ont su conduire le peuple jusqu’à sa libération. Nous ne devons cependant pas nous imaginer une population unie dès le commencement de la Révolution dans un seul élan vers l’indépendance nationale. Loin de là. La Révolution était inégalement suivie sur le plan géographique. Les habitants des villes côtières, Génois d’origine ou liés par intérêt avec eux, se sont toujours tenus à l’écart de l’insurrection. De même, les habitants des régions ayant des liens commerciaux plus ou moins fructueux avec Gênes, tel le Cap Corse, se sont montrés longtemps hésitants, tandis que les seigneurs conservateurs du sud de l’île étaient méfiants, voire hostiles. Ces clivages se doublaient d’inimitiés entre familles marquantes ; si la société corse ne connaissait guère de scissions horizontales entre classe, elle était divisée verticalement en divers groupes en forme de pyramide, chacun à sa tête, un chef, soutenu par sa famille et ses partisans ; le phénomène des clans qui n’a point disparu de l’île. Finalement, n’oublions pas, comme le souligne Fernand Ettori, que certains Corse ont combattu contre les insurgés tout au long de la Révolution dans des régiments de Gênes (7).

La Révolution, surtout à ses débuts, n’engageait donc qu’une partie de la population, et cette partie était scindée par des rivalités internes. Rien d’étonnant à ce que ses débuts soient demeurés longtemps fluctuants et imprécis. Selon le chroniqueur Rossi il y avait, en 1731, trois courants d’opinion chez les insurgés. Les uns voulaient déclarer la Corse république indépendante : c’était la solution extrémiste que la majorité considérait irréalisable. D’autres voulaient s’assurer de la protection de quelque prince étranger pour ne plus dépendre de Gênes. Et encore d’autres ne visaient qu’à obtenir des concessions de Gênes, au besoin par les armes. (8).

Ces divergences dans la population ne doivent pas trop nous étonner : elles sont caractéristiques de révolutions de ce genre. Il nous manque malheureusement des études comparatives de la Révolution corse avec d’autres mouvements de décolonisation. Mais nous n’avons qu’à puiser dans nos propres mémoires pour trouver des analogies, des exemples d’hésitation, de contradictions, et de dissensions au sein d’un tel mouvement : n’oublions pas la guerre d’Algérie.

Ce qui est remarquable dans la Révolution corse n’est pas que de tels problèmes aient existé, mais que malgré eux, le mouvement révolutionnaire ait persisté, se soit amplifié, et finalement ait triomphé. La conscience nationale s’est développée sous le choc de déceptions répétées. Les diverses négociations entreprises avec Gênes ont échoue ; l’espoir de trouver une protection étrangère s’est avéré mal fondé : l’Espagne, sollicitée dans les premières années de la Révolution, s’est désintéressée de l’île. Face à ces obstacles, les insurgés ont réagi en prenant en main leur propre destin, pour réaliser finalement une véritable indépendance.

Ils n'ont pourtant pas atteint ce but par la force des armes. Les quelques victoires-surprises corses, dont fait état ce que l’on peut appeler l’historiographie traditionnelle, ont donné la manifestation du grand courage des insurgés sans, toutefois, leur procurer le moindre avantage. Au contraire : les victoires remportées contre les Français, à Borgo, en 1738 et 1768, n’ont eu pour résultat qu’une augmentation écrasante des forces françaises dans l’île. Les Corses, d’ailleurs, n’ont pas su tirer profit de l’intervention anglo-austro-sarde en leur faveur lors de la guerre de Succession d’Autriche. N’oublions pas ce que le regretté René Emanuelli a qualifié de " décision absurde ", en 1745, alors que les Anglais bombardaient Bastia. Trois forces s’y trouvaient en présence : une sarde, commandée par Rivarola, et les deux autres corse, commandées par Matra et Gaffori. Les chefs, incapables de s’entendre, n’ont rien trouvé de mieux à faire que d’évacuer la ville (9). L’occasion d’occuper Bastia était perdue pour de bon. Mal armés, les insurgés, seuls, n’ont pu s’emparer des villes génoises, pas même sous la direction de Paoli. En effet, l’unique victoire qui ait marque son règne, la prise de Capraia, fut plutôt une opération de prestige, qui ne changea en rien la destinée du peuple corse. En revanche, les insurgés ont fait preuve d’un esprit audacieux et créatif dans leurs tentatives d’organisation politique, qui étaient très en avance sur leur temps. Tout au long de la Révolution le génie corse s’est exprimé par une série de systèmes politiques qu’on peut appeler des constitutions primitives, et qui ont abouti à la constitution de Paoli, véritable régime parlementaire. En cette évolution idéologique réside l’intérêt de la Révolution corse, phénomène sous-estimé et insuffisamment étudié, qui mérite une diffusion plus grande qu’il n’a connue. Dès le début de la Révolution, les insurgés étaient conscients de l’importance du consensus populaire. Les premiers chefs furent proclamés en 1730 par la voix du peuple. Ce fut encore par la volonté populaire que fut entreprise, en janvier 1735, la première tentative d’organisation nationale, lors d’une " consulta " à Corti par trois généraux, dont l’un Giacinto Paoli, père de Pasquale. Nous ne devons point sous-estimer le rôle qu’ont joué les " consulte " dans la Révolution corse. Institution coutumière, que ne consacrait aucune législation, elles furent convoquées dès le Moyen Age : la première dont nous possédons un témoignage documentaire est de 1264, quand Sinucello della Rocca fit accepter au pays un genre de constitution rudimentaire (10). Assemblées régionales ou insulaires, les " consulte " réunissaient des représentants désignés par leurs communautés ou leurs " pievi ". Elles se sont tenues par intervalles à travers l’histoire corse, en temps d’insécurité ou de guerre civile. La coutume survécut aux diverses dominations étrangères, comme un embryon de démocratie indestructible. Pendant la Révolution les " consulte " furent très nombreuses : Rossi en note soixante-dix pendant les vingt-six premières années de la Révolution jusqu’au moment, en 1755, où Paoli transforma la " consulta " en Diète, parlement nationale (11). Ce fut lors de " consulte " successives que furent prises les décisions qui donnèrent son originalité à la Révolution corse. Dans celle de 1735, toutes négociations avec la République ayant échoué, la Corse fut déclarée libre de Gênes. Libre, mais non pas nation indépendante : il y a là une nuance. En effet, certains espéraient toujours mettre le pays à l’abri d’une puissance étrangère protectrice. Un système de gouvernement fut adopté, propre à assurer l’organisation du territoire libéré. Le pouvoir central restait aux mains des trois généraux, qui étaient désignés " primait " ; une junte exécutive et une diète générale étaient prévues, composées de députes élus dans leurs communautés. Les " primati " avaient cependant le droit d’en nommer d’autres : le système donc moins que démocratique (12). Ce qui le particularise, c’est l’essor précoce d’une conscience nationale, et la volonté du peuple d’affirmer son identité à travers sa propre organisation : chose courante de nos jours mais pratiquement inconnue à l’époque. L’historien R.R. Palmer, dans son magistral ouvrage The Age of Democratic Revolution, qui ignore la Révolution corse, affirme que le peuple de l’Etat de Massachussets fut le premier, en 1780, à s’ériger en " pouvoir constituant " (13).

Cette constitution primitive corse fut suivie d’autres, adoptées selon les exigences de la situation politique. En 1736 les Corses accueillirent un aventurier allemand Théodore de Neuhoff qui, apportant munitions et vivres, se fit couronner roi de Corse avant de s’enfuir huit mois plus tard court d’argent. Théodore a été malmené par certains historiens : aventurier il l’était, mais il avait aussi un idéal : Margaret Jacob a révélé qu’il était soutenu par des groupes révolutionnaires anti-monarchistes en Hollande. Le peuple corse, de toute manière, n’était pas dupe de ses prétentions ; car il lui imposa un régime de monarchie constitutionnelle, conçu par l’avocat corse Sebastiano Costa, selon lequel il était conseillé par vingt quatre représentants des différentes régions de l’île et ne pouvait prendre aucune décision sans leur accord (14).

L’esprit d’invention politique des Corses, nous le voyons, ne fut jamais en défaut. En 1739 les patriotes sont vaincus par les forces françaises et leurs chefs partent en exil, y compris Giacinto Paoli, qui se retire à Naples, emmenant avec lui son fils Pasquale, âgé de quatorze ans. Pourtant les essais d’organisation politique reprennent après le départ des troupes françaises. Dans les années suivantes nous voyons un véritable foisonnement de constitutions, proclamées par des " consulte " et 1743, 1745, 1746 et 1747. Leurs institutions ne présentent que des variations mineures : la fonction de chef d’Etat est confiée à un collège de deux à quatre généraux ; ils sont assistés par des corps de magistrats désignés individuellement semble-t-il par des " consulte " qui en fait tiennent le pouvoir, bien qu’elles ne soient point intégrées aux systèmes de gouvernement. Chaque " cunsulta " édicte un nouveau système, avec de nouveaux membres ; il n’existe aucun mécanisme pour modifier ou renouveler les systèmes une fois édictés. Leur structure est d’ailleurs rudimentaire, avec confusion des pouvoirs militaires et judiciaires, tandis qu’il n’existe aucune autorité législative reconnue (15).

Pourtant, lorsqu’en 1752, à la fin d’une seconde intervention française, un autre système est adopté sous l’impulsion du puissant général Gaffori, celui-ci ne corrige pas les erreurs des précédents mais les reproduit à une plus forte échelle. Le pouvoir suprême est confié à un tribunal ne comprenant pas moins de cent trois membres qui exercent leur charge à tour de rôle : d’autres conseils sont également investis de pouvoirs à la fois judiciaires et exécutifs (16).

L’assassinat de Gaffori en 1753 ébranla la Révolution et amena en Corse Pasquale Paoli. Il était alors sous-lieutenant dans un régiment napolitain, le Royal Farnese, affecté à la garnison de Porto Longone, à l’île d’Elbe. Avant de se rendre en Corse, il prit la précaution de faire accepter par les chefs de l’insurrection un système de gouvernement qui fut adopté à une " cunsulta " peu après son débarquement dans l’île en avril 1755. Nous ne nous y attarderons pas, car il n’était que provisoire, et avait un caractère semblable au précédent (17).

Le 15 juillet, Pasquale Paoli était élu général en chef de la nation. Sa constitution, aboutissement de l’effort révolutionnaire, fut adoptée en novembre de cette année à une " cunsulta " tenue à Corti . Il n’est guère douteux qu’entre temps il ait étudié Montesquieu, dont il avait demandé à son père de lui envoyer les ouvrages (18). De cette application précoce des thèses de Montesquieu à une réalité concrète est sortie la constitution corse.

Le texte original nous est connu : je suis redevable à Pierre Lamotte, archiviste en chef de la Corse, de me l’avoir signalé. Il semble écrit de la main de Paoli et porte sa signature authentique. Le préambule mérite d’être cité (traduit de l’italien) : " La diète générale du peuple de Corse, légitimement maître de lui-même (" lecitiamente patrone di se medesimo ")… Ayant reconquis sa liberté, voulant donner à son gouvernement une forme durable et permanente, en le transformant en une constitution propre à assurer la félicité de la nation… " (19).

Arrêtons-nous sur les termes utilisés dans ce document rédigé plus d’une trentaine d’années avant les révolutions américaine et française. Le peuple se déclare maître de lui-même, c’est-à-dire souverain : concept tout a fait original à l’époque. Notons aussi le mot " reconquis " (" riaquistata ") : le peuple reprend sa liberté comme un droit primordial. Ne peut-on pas discerner ici une influence du " Discours sur l’Inégalité… " publié la même année ? Paoli, ne l’oublions pas, entra par la suite en correspondance avec Rousseau.

Quoiqu’il en soit, la constitution dans son ensemble est indéniablement marquée par Montesquieu, dont l’influence se traduit dans le souci de créer un mécanisme composé de corps d’Etat interdépendants et équilibrés. De même le mot " constitution ", ici utilisé pour la première fois par rapport à un système de gouvernement corse, semble inspiré de l’auteur de " De l’esprit des lois ".

Selon le texte de la constitution, le général, c’est-à-dire Paoli, était dans l’obligation de convoquer la Diète une fois par an. Or, cette Diète n’est que la " cunsulta " traditionnelle sous un autre nom. Ce fut là un coup de maître par lequel Paoli sépara le législatif de l’exécutif, tout en intégrant l’assemblée corse dans une structure moderne. La Diète votait les lois, fixait l’impôt et décidait de la politique nationale. Elle nommait aussi, tous les ans, les membres d’un conseil exécutif, le Suprême Conseil (" Supremo Consiglio di Stato "), dont Paoli était le président permanent. Ce conseil était responsable devant la Diète. Paoli, qui n’y siégeait pas, était tenu de rendre compte de sa gestion de la nation à l’ouverture de chaque session et d’attendre " avec soumission le jugement du peuple ". En somme, la Diète avait le droit de le déposer. Remarquable à l’époque par le propre fait d’exister, la Diète l’était encore plus par l’étendue de ses pouvoirs : même en Angleterre, le parlement ne nommait pas l’exécutif, fonction réservée au monarque. Il n’y avait qu’en Suède que le Rikstag, pendant l’époque appelée " l’Ere de la Liberté ", de 1719 à 1772, élisait le conseil exécutif. Il n’est pas interdit de penser que Paoli eut connaissance de cette constitution (20).

La constitution de paoli était cependant conçue de sorte que les pouvoirs très larges de la Diète furent contrebalancés par ceux de l’exécutif et de Paoli en personne. Président du Suprême Conseil, il contrôlait en effet le système judiciaire, sur lequel le Conseil avait la main haute. Cette assimilation des pouvoirs judiciaires et exécutifs constitue, certes, à nos yeux un défaut du système.

Il y en a d’autres. Au début du régime la Diète semble avoir été composée, comme les " consulte " d’autrefois, de députés élus dans leurs communautés. Ceux-ci devaient avoir vingt cinq ans passés. Il semble que le même règlement s’appliquait aux électeurs. Ceux-ci ont parlé de suffrage dans le régime de Paoli n’ont donc pas tout à fait tort. Ni tout à fait raison. Car Paoli s’arrogeait le droit, exercé par les généraux auparavant, d’inviter à la Diète des personnes non-élues, dont certaines lui étaient redevable de leurs fonctions. A partir de 1763, il accorda au clergé, son allié, une représentation privilégiée à la Diète de quelque cent trente six membres. En 1764, il demanda à la Diète le pouvoir de veto sur sa législation ; sa demande fut rejetée et il dut se contenter d’un veto suspensif. En 1766 il semble avoir inspiré une législation conçue pour limiter le nombre d’élus et d’électeurs, ainsi que le choix des élus, législation qui ne fut guère respectée par les communautés (21).

Il ne nous est point nécessaire de supposer que, dans cette lutte contre la Diète, Paoli fut uniquement motivé par le goût du pouvoir. La Diète était composée de personnes influentes, et qui cherchaient à le devenir encore plus : c’est-à-dire les notables, les " principali ". Les procès-verbaux des élections de villages indiquent qu’ils composaient la grande majorité, sinon la totalité de l’électorat (22). Or, Paoli avait besoin d’eux pour former les cadres de l’appareil d’Etat. Son dilemme était de ne pouvoir gouverner ni sans, ni avec les notables. Le principe d’égalité, égalité devant la loi, égalité de droits civiques et politiques, est l’aspect le plus éclairé de son régime. Comme l’écrit Paoli : " Les marche par lesquelles les tyrans montent sur leur trône ne sont d’autre chose que l’inégalité des fortunes " (23). Or Paoli était environné de notables et de soi-disant nobles hostiles à ce principe. Pour résoudre ce problème Paoli eut recours à une démarche extrêmement moderne dans son contexte : la création d’une université qui formerait des jeunes hommes ayant le respect de ses idées. Les professeurs, trouvés dans le pays, étaient presque tous des moines franciscains, ordre qui avait joué un rôle influent et éclairé dans l’histoire de l’île. L’enseignement qu’ils dispensaient était rien moins que révolutionnaire. Selon un édit du Suprême Conseil le droit devait être enseigné de façon à démontrer l’origine et la vraie signification des lois, et la philosophie selon " les systèmes les plus plausibles des philosophes modernes ". Quand les bibliothèques des moines furent pillées, lors de l’invasion française, on y trouva les œuvres de Montesquieu, de Hume, Voltaire, et de Rousseau (24). Un jeune homme y fit ses études qui entra par la suite dans l’histoire, Charles Bonaparte, père de Napoléon. Dans une dissertation qu’il fit publier en 1766 sur un cours d’éthique qu’il venait de suivre, on trouve des affirmations telles que : " l’homme est doté de raison. Il est libre. La nature le mène à procurer son propre bonheur ", et : " tous les hommes sont naturellement égaux " (25).

L’université, qui ouvrit ses portes en 1765, fut visitée cette année par James Boswell, écrivain britannique venu en Corse rendre visite à Paoli. Jeune et idéaliste, il avait décidé de faire le voyage sous l’impulsion de Rousseau, qui l’avait subjugué lors de leur récente rencontre à Môtiers (26). Rousseau, nous le savons, avait la plus grande admiration pour la Corse, qu’il avait signalée, dans le " Contrat Social ", comme le seul pays en Europe capable de législation. A partir d’août 1764, il avait entretenu une correspondance avec Matteu Buttafoco et Paoli, Buttafoco l’ayant invité à rédiger une constitution pour la nation nouvellement créée. Au moment de la visite de Boswell, Rousseau semble avoir renoncé à ce projet : plus tard il jettera sur le papier quelques réflexions à propos d’une telle constitution qui ne furent retrouvées et publiées qu’au milieu du siècle suivant(27). Rousseau voyait dans les Corses le peuple de son rêve : rustique, égalitaire, sobre, courageux et épris de la liberté. Et c’est ainsi que Boswell s’apprêtait à le voir. " Je crus trouver en Corse ce que personne n’allait voir, et ce que je ne trouverais en aucun autre endroit du monde : un peuple combattant actuellement pour sa liberté, et s’élevant par ses propres forces d’un état de bassesse et d’oppression à celui du bien-être et de l’indépendance " écrit-il dans son livre célèbre (28). En effet il ne fut point déçu. Le récit de son voyage à travers l’île donne une image vivace, certes quelque peu idéalisée, du peuple corse en train de forger sa propre nation, inspiré par son chef Paoli, sage, philosophe, législateur éclairé et désintéressé. Ne nous plaignons pas que Boswell n’ait vu que le bon côté du régime : étant donné la façon dont il avait été préparé au voyage, et le fait qu’il soit l’hôte du gouvernement corse, il ne pouvait guère en être autrement. Boswell est le fidèle " reporter " de ce qu’il a vu : il ne savait pas, il ne pouvait savoir, qu’il existait au sein de la nation une opposition sournoise à Paoli, ni que la vendetta sévissait toujours. Comme le souligne la sicio-anthropologue Anne, Knudsen, un tiers seulement du document constitutionnel est consacré aux institutions ; le reste traite de la législation et de la procédure criminelle (29). Paoli eut soin de taire à Boswell les aspects négatifs du régime, car il avait besoin de lui pour faire en Angleterre une propagande à son avantage. Ce que fit Boswell, avec ténacité et loyauté, commettant même l’acte illégal de lui fournir des armes dans la guerre contre la France qui se déclara en 1768, peu après la parution de son livre, un best-seller de l’époque. Nous connaissons la suite : les Corses tinrent tête à l’armée française pendant près d’un an, jusqu’à la défaite de Ponte Novu, le 8 mai 1769. Lutte héroïque, selon Voltaire, où les Corses construisirent une barricade avec des cadavres de leurs morts tandis que les blessés se jetaient volontairement sur le tas (30). Lutte moins héroïque selon d’autres : quoi qu’il en soit, Paoli ne fut pas présent sur le champ de bataille. S’il est indéniable que beaucoup de Corses résistèrent à l’invasion avec une grande intrépidité, il est non moins vrai que d’autres passèrent à l’ennemi. Matteu Buttafocu en donna l’exemple ; le conte de Guibert, célèbre stratège, forma une légion corse qui ne tarda pas à s’engager dans la lutte (31).

Que restait-il de l’œuvre de Paoli après sa retraite en Angleterre ? Bien peu de chose. Tout ce qu’il avait réalisé en Corse fut anéanti par la conquête. L’université fut fermée ; des demandes répétées pour sa réouverture furent ignorées (32), et les Corses durent attendre jusqu’en 1982 pour qu’elle soit rétablie. Les thèses politiques de Paoli, étouffées en Corse, n’eurent aucune application pratique en Europe, malgré la belle propagande que lui avaient fait Rousseau, Boswell et Voltaire, et l’enthousiasme qu’il avait suscité en certains milieux (33). Ce n’est qu’en Amérique où un autre peuple cherchait à se décoloniser que le régime de Paoli provoqua un intérêt actif. A partir de 1766 sa lutte fut applaudie par les " Fils de la Liberté ". Sa popularité atteint son apogée lors de l’invasion de la Corse ; son nom fut célébré dans des banquets avec des vœux tels que : " que les tentatives de la France contre la Corse trouvent le même sort que celles de la Perse contre la Grèce… qu’elles soient repoussées honteusement ". Le " Paoli Tavern ", non loin de Philadelphie, était un lieu de rassemblement préféré des patriotes ; par la suite un village se développa sur le site pour devenir une ville qui compte aujourd’hui quelques 20.000 habitants. Cinq autres localités des Etats-Unis portent son nom et il existe une ville appelée Corsicana. Quand Paoli débarque en Angleterre en 1769, l’un des premiers à le saluer fut le grand patriote Benjamin Franklin (34).

Nous devons cependant nous méfier d’une tradition bien ancrée en Corse qui veut que la constitution des Etats-Unis ait été inspirée par celle de Paoli. Les discussions d’où est sortie la constitution des Etats-Unis en 1787 ont été notées par un délégué à la Convention, James Madison, et cet énorme procès-verbal, connu sous le nom de " Madison’s Debates " a été publié par la suite. Or j’ai compulsé ce tome sans trouver la moindre référence à la Corse ou à la constitution de Paoli, bien que d’autres soient évoquées ; celles de la Suisse, de la Hollande, et bien entendu de l’Angleterre. Les ressemblances qu’on peu constater entre les constitutions de Paoli et celle des Etats-Unis peuvent être attribuées à l’influence sur les deux de Montesquieu et du courant de pensée de l’époque (35).

Pourquoi cet oubli ? Sans doute, parce qu’en 1787 les affaires américaines étaient aux mains d’une nouvelle génération de révolutionnaires, et que Paoli s’était discrédité à ses yeux par son attachement au roi Georges III, qui lui versait une pension. En fait Paoli n’a témoigné que peu d’intérêt ou de sympathie pour la révolution américaine, qu’il voyait plutôt comme un obstacle à son dessein d’engager l’Angleterre à libérer la Corse, les troupes britanniques étant retenues de l’autre côté de l’Atlantique (36).

Ce dessein ne se réalisa pas. Paoli dut attendre la Révolution française pour être rappelé dans son pays. La constitution de 1790 ne devait rien à la sienne : la Révolution française avait engouffré la Révolution corse.

 

NOTES

Sigles :

ADCS : Archives départementales de la Corse du Sud.
BSSHNC : Bulletin de la Société des Sciences Historiques et Naturelles de la Corse.
EC : Etudes Corses.
CH : Corse Historique

  1. Voir Ambroggio Rossi : Osservazione storiche sopra la Corsica, rédigées 1778-1820, 17 vol., dont 13 publiés dans BSSHNC, 1895-1906, voir vol. VI (1897, fs. 202-205), VII (1898, fs 209-213, VIII (1899, fs. 214-217, IX (1900, fs. 229-233), X (1900, fs. 237-240), XI (1902, fs. 260-265) ; Pierre Antonetti : Histoire de la Corse (Paris (1973) ; Francis Pomponi : Histoire de la Corse (Paris 1979).
  2. la Jean-A. Cancellieri : " Directions de recherche sur la démographie de Corse médiévale (XIIIe-XVe siècles) ", extrait de Structure familiari epidemie migrazioni nell’Italia medievale (Naples, 1984).
  3. Fernand Ettori : " Inféodation et mise ne culture des plaines corses aux XVIe et XVIIe siècles ", EC (1955, n°6) ; " Emphytéotes et fermiers du domaine public au XVIIe siècle ", EC (1956, n°9) ; " La paix génoise ", Histoire de la Corse, éd. Paul Arrighi (Toulouse, 1971).
  4. Francis Pomponi : " Essai sur les notables ruraux en Corse au XVIIe siècle " (Aix, 1962).
  5. Voir Ettori, " La paix génoise ", op.cit. ; Gregorio Salvini : Giustificazione della rivoluzione di Corsica… (Corte, 1758).Population : " Etats de population ", archives nationales Q1 298.
  6. Voir Pierre Lamotte : " Deux aspects de la vie communautaire en Corse avant 1768 " EC (1956, n°9) ; " Le système des ‘Prese’ et les assolements collectifs ", EC (1956, n°10). Selon le Plan Terrier, réalisé sous la monarchie française, les terres communales représentaient 30,04 pour cent de la totalité ; mais ce pourcentage était certainement en-dessous de la réalité à l’époque du régime de Paoli, la monarchie ayant distribué des étendues importantes à des particuliers : voir Jean Defranceschi : Recherches sur la nature et répartition de la propriété foncière en Corse de la fin de l’Ancien Régime jusqu’au milieu de XIXe siècle (Ajaccio, 1986).
  7. Voir Ettori : " La Révolution de Corse (1729-1769) ", Histoire de la Corse, éd. Paul Arrighi, op.cit.
  8. Rossi, op.cit., vol. VI, pp. 43-48.
  9. René Emmanuelli : Precis d’Histoire de la Corse (Ajaccio, 1970, p. 95.
  10. Chronique de Giovanni della Grossa, BSSHNC (1888, fs. 85-90), pp. 181-182).
  11. Rossi, op.cit., vol. VI-X.
  12. Publié par Lamotte : " La déclaration d’indépendance de la Corse ", EC (1954, n°2). Voir aussi Emmanuelli, op.cit. pp. 80-82 ; Ettori : " La Révolution de Corse ", op.cit. pp. 315-316. A cette occasion la nation fut placée sous la protection de la Sainte Vierge. Le clergé (à part les évêques, tous Génois, qui restaient dans les villes côtières) s’était rallié à la Révolution. Des théologiens réunis en cunsulta à Orezza, août 1731, avaient pris en considération les doléances des insurgés sans pour autant proclamer une " guerre sainte " : voir Antonetti, op.cit. p. 314.
  13. R.R. Palmer : The Age of Democratic Revolution, 2 vol, (Princeton et Londres, 1959), vol. II. P. 224.
  14. Rossi, op.cit. vol. VII, pp. 172-173 ;voir aussi Sebastiano Costa, Mémoires…, trad. Renée Luciani, 2 vol. (Aix, Paris, 1971-1975) ; Margaret Jacob : The Radical Enlightenment (Londres, 1981).
  15. Rossi, op.cit. vol. VIII-IX ; voir aussi Carrington : " The carsican constitution of Pasquale Paoli ", The English Hsitorical Review (1973, n°348).
  16. Publié par Lamotte : " la formation du premier gouvernement corse autonome ", CH (1953, n°2).
  17. Publié par Dom. Ph. Mariani : " La Consulte de Caccia… ", BSSHNC (1913, fs. 352-354).
  18. Election de Paoli : Rossi, op.cit., vol. X, PP. 123-126. Lettre de paoli à son père, 20 oct. 1754, BSSHNC (1885, fs. 49), P. 56.
  19. Document original de la constitution, ADCS 7 J 1 (nouvelle classification ). Voir Carrington : " Le texte original de la constitution de Pasquale Paoli ", BSSHNC (1976, fs. 619-620).
  20. Voir Ragnar Svanström et Carl Fredrick Palmestierna : A short History of Sweden, trad. Joan Bulman (Oxford, 1934), pp. 189-253.
  21. Suprême Conseil, système judiciaire : voir documente de la constitution, op.cit. Elus plus de 25 ans : lettre de Paoli de convocation à la Diète, 29 mars 1764, BSSHNC (1888, fs. 95-96), pp. 626-639. Invitation de personnes non-élues : lettre circulaire de Paoli, 16 mai 1762, BSSHNC (1887, fs. 75-77), pp. 364 ; clergé : lettre circulaire de Paoli, 7 janv. 1763, BSSHNC (1887, fs. 75-77), p. 432. Veto : rapport de la Diète de mai 1764, N. Tommaseo, Lettere di Pasquale de Paoli (Florence, 1846), pp. 51-54 ; F.R.J. de Pommereul : Histoire de l’Isle de Corse, 2 vol. (Berne, 1779), vol. II, pp. 62-63. Paoli, lutte avec la Diète : voir Carrington : " Paoli et sa ‘constitution’ ", Annales historiques de la Révolution Française (1974, n°218), Réédité, La Corse de Lumières à la révolution (Ajaccio, 1979).
  22. Procès-verbaux des élections des villages : ADCS, Gouvernement corse 27 (nouvelle classification).
  23. Lettre de Paoli à Casabianca, 15 juillet 1764, BSSHNC (1888, fs. 95), p. 672 672.
  24. Création de l’université : rapport de la Diète, déc. 1763, ADCS, Gouvernement corse, 1553 (nouvelle classification). Enseignement : lettre circulaire de Paoli et du Suprême Conseil, 25 nov. 1764, Tommaseo, op.cit. pp. 64-66. Bibliothèque : Pommereul, op.cit. vol. II, pp.69-71.
  25. Carolus Charles Bonaparte :
    Exercitationes accademicae in secundam partem.
    Ethicae di jur., nat., et gent. (Corte, 1766).
  26. James Boswell : An Account of Corsica… (Londres, 1768) ; voir trad. S.D.C., Etat de la Corse… (Londres, 1769). Voir aussi Fredrick Pottle : James Bswell : The Earlier Years, 174à-1769 (Londres, 1966).
  27. Jean-Jacques Rousseau : Du contrat social (1762), livre II, chap. X. Son " Projet de constitution pour la Corse " fut publié avec sa correspondance avec Buttafoco dans Œuvres et correspondance inédites de J.J. Rousseau, éd. M.G. Streckeinsen-Moultou (Paris, 1861) ; voir réédition par Philippe Castellin et Jean-Marie Arrighi dans Projets de constitution pour la corse (Ajaccio, 1980). Rousseau fait référence aux lettre qu’il a reçues de Paoli dans Les confessions, livre XII.
  28. Boswell : Etat de la Corse, op.cit., p. 159.
  29. Voir A. Knudsen : " Les idées muettes ", à paraître, et Carrington : " Le texte original de la constitution de Pasquale Paoli ", op.cit.
  30. Voltaire : Précis du sècle de Louis XV, (seconde édition, 1769), chap. LX.
  31. Voir Rossi, op.cit., vol. XI, pp. 363-368 ; J.-A.-H. de Guibert : " Opérations militaires… ", BSSHNC (1913, fs. 352-354).
  32. Voir demandes pour la réouverture de l’université formulées sous la monarchie française aux Assemblées des Etats de Corse : " Procès-verbaux… des Etats de Corse… ", 1770, 1772, 1773, BSSHNC (1896, fs. 188-192), 1775, 1777, BSSHNC (1899, fs. 219-226), 1781, BSSHNC (1904, fs. 283-285) et dans les cahiers de doléances de la Noblesse et du Tiers publiés dans Lucette Ponsin : Les Doléances de la Corse à travers les Cahiers de 1789 (Ajaccio, 1988) fs. VI, VII.
  33. Voir Franco Venturi, articles sur la Révolution corse dans Rivista Storica Italiana (1974, n°I, IV 1976, n°I). Selon Jean Defranceschi, la publicité donnée à la corse révolutionnaire par Rousseau aurait incité Choiseul à écraser le régime de paoli parce qu’il menaçait l’ordre social établi : " Corse " dans Dictionnaire Napoléon, éd. Tulard (Paris, 1987).
  34. Voir Francis Beretti : " Pascal Paoli inspire les patriotes américains ", BSSHNC (1974, fs. 611). Benjamin Franklin : Dominique Colona, Le vrai visage de Pascal Paoli en Angleterre (Nice, 1969), p. 45.
  35. The Debats of the Federal Convention of 1787 which framed the Constitution of the United States of America, reported by James madison, éd. G. Hunt et J.B. Scott (New York, 1920).
  36. Voir entretien de Venturone Benedetti avec Paoli à Londres, oct. 1776. Benedetti propose à Paoli une amnistie de la part du gouvernement français que celui-ci refuse : Rossi, op.cit., vol. XIII (BSSHNC, 1896, fs. 181-185), pp. 38-46 ; Paoli à Benedetti : " Sans la guerre des Américains, vous pouvez être assuré qu’il y aurait eu beaucoup de choses en Corse ", ibid., p. 45.

Dorothy Carrington.

Les traductions de l’Italien sont de l’auteur avec le concours de René Darando.